Pourquoi faut-il se méfier des candidats qui annoncent la suppression du RSI ?
Le 14/03/2017 à 16h30 - Expert Zone
Le sondage GENERIK sur les intentions de votes des coiffeurs a été publié, et les résultats sont sans appel : Macron est le candidat le plus plébiscité par les coiffeurs avec 32,08% des voies, suivi de très près par Marine Le Pen (29,50% des voies). S'en suivent François Fillon (18,22%), Jean-Luc Mélenchon (10,30%) et Benoît Hamon (9,90%).
Une volte-face des coiffeurs qui nous a quelque peu surpris... En effet, Macron était pendant longtemps la bête noire des coiffeurs dans le cadre de la loi Sapin 2, ou celui-ci avait prôné purement et simplement la suppression du CAP et du BP coiffure (avant de se raviser). Si sa popularité lors de sa visite sur le Mondial était la démonstration de sa popularité grandissante auprès des coiffeurs, nous n'aurions jamais parié sur une victoire de Macron dans les intentions de vote. Nous avons donc étudié son programme, et nous sommes rendus compte qu'une des mesures phare du candidat, largement plébiscité par les gérants de salon était la suppression du RSI. Un argument de campagne qui fait mouche auprès des coiffeurs, las des nombreuses approximations du régime lors des appels à cotisations, et de ses méthodes de calcul opaques. Mais pourtant, la promesse du candidat (aligner les régimes et faire en sorte que les indépendants aient les mêmes droits que les salariés) pourrait bien, si elle est appliquée comme présentée, mettre un coup d'arrêt final à l'entrepreneuriat en France. Retour sur cet argument de campagne qui fait mouche auprès des entrepreneurs, mais qui pourrait bien tuer définitivement toute volonté d'entrepreunariat en France !
La position des candidats vis-à-vis du RSI
Chaque candidat a sa propre solution vis-à-vis du "problème" RSI, avec ses punclines toutes plus ou moins réussies ("je vais supprimer le RSI", "suppression du RSI qui trop souvent mène au RSA" etc... ) :
- Emmanuel Macron : alignement des régimes indépendants / salariés
- Marine Le Pen : Refonte du RSI pour proposer au choix l'alignement sur le régime général ou la conservation d'un régime spécifique sur la base de l'autodéclaration (estimation du salaire par les entrepreneurs et régulation à la fin de l'année)
- François Fillon : refuse la fusion avec le régime général et souhaite au contraire augmenter l'indépendance du RSI qui aujourd'hui selon lui est trop liée au régime général. Il voudrait tout de même réformer le RSI pour créer une caisse des indépendants qui garantirait notamment un revenu pour les entrepreneurs qui se retrouveraient en situation de perte d'activité
- Benoît Hamon : suppression du RSI et création d'un régime unique (statut social unique de l'actif). Alignement des cotisations, alignement des protections
- Jean Luc Mélenchon : suppression du RSI et alignement des indépendants sur le régime général
Comme vous pouvez le constater, la promesse est relativement similaire pour tous les candidats. En dehors de François Fillon, tous les candidats prônent un alignement du régime social des indépendants sur le régime général. Une mesure plus que contestable...
Pourquoi il est tentant de vouloir croire à la suppression du RSI pour l'alignement sur le régime général ?
Le RSI cristallise les frustrations des entrepreneurs. mais plus que les couacs (qui sont existants mais qui restent anecdotiques), c'est le fonctionnement du RSI qui pèche, à savoir :
- Rattrapage des cotisations lors de la 3è année, qui si il n'est pas anticipé peut mener à de graves déconvenues pour la société
- Impression pour les entrepreneurs de cotiser pour rien. La retraite et l'assurance maladie du RSI offrent des couvertures minimales, pas d'assurance chômage...
- Et plus généralement, c'est le fait de cotiser qui pose problème. L'entrepreneur (dont je fais partie) n'aime pas que l'on vienne le ponctionner en taxes diverses et variées, surtout si il estime que la contrepartie proposée n'est pas à la hauteur.
Tous ces éléments réunis font que le RSI est la cible facile des politiciens pour s'assurer du soutien des entrepreneurs (qui sont 2,8 millions à cotiser à cette caisse, rapelons-le...). Et pourtant, la réalité est quelque peu différente...
Quel est le coût réel du RSI par rapport au régime général ?
Le montant moyen constaté des cotisations RSI est de 45% (celui-ci est amené à varier en fonction du salaire versé, plus il est important, plus le taux baisse). Le régime général quant à lui a un taux de cotisation moyen de 62%. Autrement dit, sur un salaire de 10 000 euros :
- Reste à vivre en passant par le RSI : 5 244 euros (cotisations de 4 756 euros) -> 48% de cotisations
- Reste à vivre en passant par le régime général : 3 737 euros (cotisations de 6 263 euros (2104 euros de charges salariales et 4159 euros de charges patronales)) -> 63% de cotisations
Soit une augmentation de 15 points des cotisations en passant du RSI au régime général. Une différence qui s'explique tout simplement par les prestations plus importantes (et donc plus chères) du régime général : retraite et assurance chômage.
Si on se base sur le salaire médian en salon de coiffure (16 308 euros / an), la différence annuelle de cotisation est de près de 1000 euros en moins par an en passant par le régime général. Autant d'argent qui sortira de la trésorerie du salon pour finir dans les poches de l'état, ce qui handicapera grandement la capacité d'investissement des salons de coiffure, et qui mettra à n'en pas douter un coup d'arrêt définitif à l'entrepreneuriat en France.
Sans compter la hausse obligatoire des cotisations du régime général, avec l'arrivée de 2,8 millions de cotisants en plus sur une caisse déjà largement en déficit... Il ne fait aucun doute qu'en cas de fusion des régimes, le taux de cotisation risque de dépasser les 70%.
Il est donc nécessaire de réfléchir à deux fois avant de soutenir tel ou tel candidat qui prône l'alignement des régimes, cette mesure est dangereuse pour l'entrepreneuriat. Le RSI est certes défaillant dans ses processus, mais le système est loin d'être aussi mauvais que ce que l'on veut nous montrer...